D'Etienne de La Boétie à Hannah Arendt : la servitude volontaire// L'obéissance (1/3)

Summary

Dans le Discours sur la servitude volontaire d’Étienne de la Boétie, l’auteur met en lumière le paradoxe de l’obéissance volontaire, où des millions de personnes se soumettent à un tyran alors qu’elles pourraient facilement se révolter. À travers l’histoire, Boétie suggère que la servitude résulte de l’habitude, des intérêts personnels et de la légitimité donnée par le consentement. Ce phénomène est illustré par des figures comme Eichmann, qui, selon Hannah Arendt, incarne la banalité du mal, agissant sans conscience ni empathie. Ce texte questionne le rôle de la soumission dans l’exercice du pouvoir et explore la responsabilité collective dans la domination.

Takeaways

• 😀 Étienne de la Boétie interroge le phénomène mystérieux de la soumission volontaire des masses à un tyran, alors qu'elles pourraient se révolter et renverser le pouvoir.
• 😀 L'auteur met en avant l'idée que l'obéissance vient de la culture et des habitudes, ainsi que des croyances établies, comme celle de voir le roi comme un représentant divin.
• 😀 Selon Boétie, l'obéissance est liée à des intérêts individuels et collectifs, dans lesquels le peuple accepte la domination en échange de petites gratifications.
• 😀 Le proverbe romain « Donne-leur du pain et des jeux » illustre comment les dirigeants maintiennent le contrôle en offrant des distractions et des avantages matériels.
• 😀 Boétie défend l'idée que nous naissons libres et qu'abandonner cette liberté est un choix personnel, révélant la fragilité des régimes, même ceux basés sur la terreur.
• 😀 La soumission des peuples à des régimes autoritaires est maintenue parce que nous choisissons d'y consentir, ce qui remet en cause les explications simplistes de la domination par exploitation.
• 😀 L'obéissance, en dehors des situations de conflit moral, devient invisible et naturelle dans la vie quotidienne, comme acheter un billet de métro ou payer des impôts.
• 😀 L'exemple de l'Holocauste et des procès de Nuremberg montre que l'obéissance aveugle, même lorsqu'elle entraîne des crimes contre l'humanité, est souvent perçue comme légitime en raison de l'obéissance à la loi.
• 😀 Le procès d'Adolf Eichmann illustre comment un fonctionnaire peut participer à des atrocités sans conscience de culpabilité, en se justifiant par la simple obéissance aux ordres.
• 😀 Hannah Arendt a décrit le concept de la « banalité du mal », expliquant que les crimes monstrueux peuvent être commis par des personnes normales, souvent sans intention malveillante, mais à travers une bureaucratie déshumanisée.

Q & A

Qui est l'auteur du Discours de la servitude volontaire et quand a-t-il été publié ?

L'auteur du Discours de la servitude volontaire est Étienne de la Boétie, et il a été publié en 1576, bien qu'il ait été rédigé alors que l'auteur était encore adolescent.

Quelle est la principale question soulevée par Étienne de la Boétie dans son œuvre ?

La principale question soulevée par Étienne de la Boétie est de comprendre pourquoi des milliers, voire des millions de personnes se soumettent à la loi d'un seul homme, le tyran, alors qu'elles pourraient facilement se révolter contre lui.

Que signifie le terme 'obéir' étymologiquement selon le texte ?

Etymologiquement, 'obéir' est un composé de 'ob' (vers) et 'audire' (écouter), signifiant 'écouter une voix venant de l'extérieur, d'au-dessus'.

Quels sont les arguments avancés par de la Boétie pour expliquer la soumission à l'autorité ?

De la Boétie avance que la soumission est due à des coutumes et des habitudes, ainsi qu'à un système de croyances qui fait du roi un émissaire de Dieu. Il mentionne aussi l'idée d'intérêts individuels qui lient les gens à un pouvoir qui leur accorde des gratifications en échange de leur docilité.

Quel proverbe romain reste pertinent aujourd'hui selon de la Boétie, et quel est son sens ?

Le proverbe romain cité par de la Boétie est 'Donne-leur du pain et des jeux, et ils seront heureux'. Il suggère que pour maintenir le contrôle sur la population, il suffit souvent de satisfaire leurs besoins matériels et de les divertir.

Quel est le rôle de l'obéissance dans la perpétuation du pouvoir selon de la Boétie ?

Selon de la Boétie, l'obéissance est cruciale dans la perpétuation du pouvoir. Les régimes existent parce que les peuples consentent à l'autorité, créant ainsi la légitimité du pouvoir et permettant sa continuité.

Comment la Boétie explique-t-il la fragilité des régimes, même ceux basés sur la terreur ?

De la Boétie soutient que la fragilité des régimes, même ceux fondés sur la terreur, réside dans le fait que les peuples peuvent toujours se libérer en choisissant de ne plus servir, d'où la déclaration 'Résous-toi à ne plus servir, et tu seras aussitôt libre'.

Quel exemple contemporain est utilisé pour illustrer l'idée de la soumission volontaire dans l'œuvre de de la Boétie ?

L'exemple contemporain utilisé est celui de l'exécution de Mouammar Kadhafi et de la capture de Saddam Hussein, qui montrent comment des tyrans peuvent être renversés lorsqu'ils perdent le soutien des masses.

Quelle est la notion clé introduite par Hannah Arendt concernant la banalité du mal ?

Hannah Arendt introduit la notion de 'banalité du mal' pour décrire comment des individus apparemment ordinaires, comme Adolf Eichmann, peuvent accomplir des actes monstrueux sans être motivés par une volonté de faire le mal, mais simplement en suivant des ordres et en agissant de manière bureaucratique.

Comment Eichmann se justifiait-il lors de son procès et quel terme Arendt a-t-elle utilisé pour décrire ce phénomène ?

Eichmann se justifiait en disant qu'il n'avait fait qu'appliquer la loi de manière mécanique et impersonnelle, sans aucune intention malveillante. Arendt a qualifié ce phénomène de 'banalité du mal', soulignant l'absence de réflexion morale et d'empathie dans ses actions.